dimanche 3 juin 2012

16 mars. 


            12h45. Las trece menos cuarto. J’ai émergé à 12h00. Couchée à 7h. Même en France je n’ai jamais fait ça (!) (nuit blanche oui, mais me coucher à l'heure de se lever, non!) J’ai montré mes photos, celles d’Alexandre, de Xavier, j’ai essayé la présentation de film de Mathieu mais internet n’est pas assez rapide. Bastante rapido. Il y a des mots qui me viennent en espagnol.
 
            Estoy en una familla loca. C’est leur définition. Je leur ai dit que j’étais loca aussi. J’ai bu du mojito, du vino tinto et de la pina. Et j’ai envie de me recoucher (en fait, je suis couchée, mais c’est plus dans le sens ‘’rendormir’’, auquel je pensais). Mais il faut que je cherche un bus.


            Je me suis rendue compte que j’avais eu la présence d’esprit de brancher (poner a cargar ?) ce qui devait l’être (téléphone, batterie, ordi, lecteur mp3) ; et que j’ai dormi avec le sachet de chargeurs.
            C’est assez abstrait.
            J’entends le vent.
            J’ai appris qu’une partie de Punta Arenas (el centro) a été inondée (et pas qu’un peu) et que les hôtels ont du être évacués. Mmh. Buenas Noches. (Gné.)
            Bon. Je tiens debout. C’est bien. Avec le sac... la mochila demasiada e amarilla vivo. Pas sûr.

            En fait je ne tiens pas debout tellement longtemps (hum). J’ai oublié de dire que je suis bien arrivée, une dame al aeropuerto de Santiago m’a invitée à dormir chez elle à Punta Arenas. Un minibus contenant ses petits enfants, fils, mari, belle fille, (etc) est venu la chercher à l’aéroport ; et m’a embarquée aussi, du coup.






            13h37… J’ai pris el desayuno, con té, y pan con jamon et fromage. C’est un peu un comble, le jamon (jambon). Mais ça m’a fait du bien, je crois, malgré la vague culpabilité / réalisation de la provenance de la chose. Il y a vraiment beaucoup de vent, ça me fait penser au dernier jour à Punta el ano pasado, en plus confortable. Avec les caniches tondus remplacés par un cocker velu qui reste dehors (malgré ses protestations).

            ‘’Aucun réseau sans fil n’a été détecté.’’ Ah. C’est intéressant, parce que … y’en a un. J’avais internet hier soir.
            Je voulais filmer la maison mais il y a trop de monde maintenant, tous ceux d’hier soir (Delpina, su marido, dos nietos (petits enfants), la hija mayor (la fille ainée), su marido, el hijo soltero, una otra hija con su marido, …(!)). Je vais peut être tenter d’essayer d’oser quand même… C’est un véritable labyrinthe, j’ai longtemps cru que je ne retrouverai jamais l’entrée et que je resterai enfermée à jamais là dedans. Ah tiens, il pleut… quelle surprise… J’ai essayé de boire au robinet … ça a arrêté la machine à laver j’ai l’impression. Hahahahaaa … bordel.




            17h. J’ai rêvé de sac. Ca fait une heure que j’attends dans l’agence de bus, avec l’estomac qui proteste activement contre les boissons alcoolisées et la viande que j’ai avalées. Je me suis affalée sur mon gros sac, et à chaque fois que j’ai fermé les yeux, j’ai eu des visions de bagages. Mon sac gênait, on me volait mon sac, mon sac disparaissait, quelqu’un voulait s’asseoir sur mon sac, une personne regardait mon sac, mon sac bloquait le passage, mon sac s’est retrouvé dans la forêt … Mmh.
            Tengo sueno. J’ai sommeil. J’essaye de m’en persuader du moins parce que c’est la seule chose utile à faire, dormir. Je ne me souvenais pas que c’était si difficile à comprendre, l’espagnol. Etrange. La familla loca m’a déposée devant l’agence de bus.. vraiment sympa. J’ai eu une chambre perso, nourrie, logée, on m’a même donné des bijoux fabriqués maison (bague, boucles d’oreilles avec pinces, bracelet) ! Il y a un bazar incroyable de câbles électriques, là dehors. De temps en temps, une chaussure ou des chaussettes pendues au milieu de la rue sur un des fils. Logique. Quand j’y pense, ça me semble assez taré que le bus puisse passer sans tout arracher.
            Enfin quelqu’un qui parle espagnol et que je comprends (même si c’est pas à moi qu’il parle). Bien !
            Y’a un arbre en forme de champignon à côté du bus.

            17h36… on est sortis de Punta Arenas je crois. Ca secoue. Le bus a grillé un feu rouge, manqué de peu un homme qui balayait la route ( ?!) et évité de justesse d’écraser une voiture contre un arbre champignonesque. Il y a une forêt folle de Nothofagus Antarctica autour, et la mer, à droite. (Waaaa(rg)).


            17h42, l’aéroport à gauche. [♫ I’m lost and always afraid ♪♫ it’s never the same place ; I close my eyes to escape. The walls around me and I drift away inside the silence ♫♪ … ] (Tarja , I feel immortal)


            17h54 On doit s’arrêter chez les carabineros… Il y a un panneau curieux : vitesse limitée à 5km/h. On n’est pas arrivé. Toujours ces bouts de bestioles à moitié grignotés sur la route. Des vautours / rapaces / condors / buses variables attendent qu’on passe en faisant du sur place. Le soleil a été gobé par un nuage pleurnichard. C’est drôle, quand je ferme les yeux, je vois un écran avec un nuage rouge fascinant. Je me réveille en sursaut à chaque fois que mon coude glisse de l’accoudoir (toutes les 1 à 2 minutes). 


            18h43. Maintenant c’est une manette avec une poignée circulaire rouge que je vois en fermant les yeux. (Hm.) Champ d’oiseaux à gauche. Clôtures interminables. Touffes joufflues.


            18h50. Mini village et drapeau coca-cola (…) J’ai cru voir un éléphant. En fait c’était un arbre je crois. (Je crois.) Moutons moumoute.


            19h15. Monolithe (Monolyte ? Monolite ? como se escribe ?) australien, version chilienne.


   19h23. Entrée dans la forêt enchantée.

   19h45. Un arrêt au milieu de nulle part. Une dame et un enfant sont sortis, un homme est venu vers le bus, et a attrapé au vol le petit qui lui bondissait dans les bras. Les nuages ont pris une multi-teinte magnifique. Rose – brun – ocre – jaune – bleu. Ils défilent à une vitesse incroyable. La forêt est complètement tarée. J’ai posé l’appareil, c’est trop fou. C’est pas terrestre ça. Des bonzaïs géants torturés dont les branches souvent pétrifiées se tordent et se tendent dans des positions impossibles. Certaines branches sont couvertes de lichen blanc chevelu, les troncs sont tourmentés, beaucoup de squelettes blanchâtre trainent, troncs délavés par la folie météorologique locale. Dessous, des épis rouges, de la mousse multicolore, dans les arbres, des touffes rouges et jaune vifs. De temps en temps, un marais pourpre couvert de branches blanches qui tendent leurs phalanges déchiquetées vers les lenticulaires mouvants. Au milieu de nulle part, un tronc solitaire, énorme, couronné de branches toutes orientées dans la même direction ; telles des mains qui chercheraient à attraper les esprits qui passeraient par là. …

    20h15… décharge entre deux clôtures infinies et des bouts de forêt enchantée miniature.

                 20h28, on arrive il me semble. Un rideau de pluie est là pour nous accueillir. A travers, on voit les montagnes… enfin … c’est très beau.



    20h33, véritable arrivée.

            Il serait temps que je dorme. Il est 00h40 je crois. Je suis bloquée ici une journée, car les bus pour El Chalten sont pleins. Je prendrais celui de 7h dimanche. Une dame m’a accueillie avec un panneau ‘HOSTAL’ en main. 7000 $ / noche ($, ce sont les pesos, hein ... 7000$ = 11€, environ), c’est bien. J’ai une chambre de trois lits pour moi toute seule, avec radiateur qui chauffe à fond et vue panoramique sur le linge qui sèche dehors. C’est surement pour ça que l’auberge s’appelle ‘’El Mirador’’ ( !)







            J’ai fait mes courses, six petits pains, un paquet de 9 ‘’laminas’’ (tranches) de fromage, 2 paquets de nouilles ‘’cheveux d’ange’’ (ce qui cuit le plus vite … des vermicelles, quoi). Deux soupes pour 5 personnes, 2 paquets de lait déshydraté (2L), des chocapics, une sorte de fromage blanc qui attisait ma curiosité, une sauce arabiata qu’il faudra que je liquide avant de partir marcher, et un truc à manger tout de suite. C’est terrifiant de penser que ce que j’achète, non seulement je dois le payer mais surtout le porter, seule.
            Les rues étaient presque désertes, un vent froid soufflait et s’engouffrait dans ma veste. Je me suis demandée ce qu’on allait bien faire du côté ‘’Pacifique’’ du Fitz Roy … Il y a quelque chose de spécial à se promener seule, la nuit, dans ces rues sombres bordées de petites maisons basses rafistolées et colorées, et d’arbres qui bougent, créant des ombres mouvantes… Une impression habituelle de solitude, mêlée de crainte, avec une liberté de faire tout ce que l’on veut, d’être responsable de ses gestes. Une angoisse aussi, de devoir parler et de ne pas savoir se faire comprendre. Et puis la foule silencieuse (ou pas) des chiens errants, qui m’ignorent totalement … et les aboiements intempestifs des chiens enfermés derrière les grilles de quelques cabanes. Estoy Sola. Ser, estar … Mmh. J’y arrive plus. Ca va revenir.
            Je me suis habitué au vent; en mangeant mes chips. Je voulais quelque chose de salé et de simple. Pas un truc qui me redonne la nausée. Des chips, ça m’a paru parfait. Avec une saveur louche, pour complexifier un peu quand même…allez, crème d’oignons. Quelle idée…! J’ai grignoté plus de la moitié du tube. (Tube, oui.) J’ai aussi été poursuivie et effrayée par un bout de papier, visité trois agences de bus, et je suis revenue. C’est vraiment agréable de marcher sans sac (non, le sachet de courses, ça ne compte pas) et en baskets.
            Maintenant, je vais aller aboyer sur le chien qui râle sous ma fenêtre et me fait sursauter à chaque jappement. Et me reposer un peu, peut être.

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