mardi 3 juillet 2012

9 avril.

Lundi de Pâques.

            Ne plus vraiment réussir à me souvenir de mes rêves commence à m’énerver. Je me rappelle juste qu’à la fin,  // on voulait aller boire un café-thé avec BBC qui m’avaient invité, mais il était trop tard, ils avaient déjà remballé les deux grandes tentes et s’apprêtaient à partir. Je disais aux autres qu’il fallait se lever avant qu’ils ne partent, mais Alexandre ne voulait pas. C’était le crépuscule. On était toujours dans ce camping avec les petites cabanes ; je crois qu’il y avait un puma pas loin… et l’équipe BBC s’en allait, elle avait son gros camion avec tout le matériel. Et je n’arrivais pas à faire se lever les autres. Je crois qu’ils sont partis avant même que je sorte de la tente. //
      
J’ai l’impression de ne pas avoir assez dormi. Pourtant …

            Là, on s’est levé, Mathieu était déjà sur la butte qui surplombe le camping depuis 7h15… moi je suis arrivée vers 8h30 ; Alexandre hibernait. Il ne voulait pas sortir. Le lever de soleil n’a pas été aussi fantastique qu’on l’imaginait, sur les Cuernos… un nuage avait décidé d’englober le soleil pour quelques temps…. Dommage car ça aurait vraiment pu être fou, avec des moutonnements rouges par les dessous, les montagnes qui se colorent, mais pas partout, en échos aux nuages. … Sauf que bon, ça n’a pas marché.
             Je suis un peu énervée contre Alexandre… il n’est pas inspiré et ne cherche pas à l’être, j'ai l'impression. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas pu faire le Tour du Fitz qu’il faut baisser les bras ! Ça m’embête aussi pour Mathieu, qui espère des bons plans et qui nous voit nous, Xavier Manue et moi essayer des choses, alors qu’Alexandre ne se lève pas … ce n’est pas nous qu’il aimerait filmer.. ! C’est  dommage. J’ai l’impression que je ne suis pas de très bonne humeur …. ! J’aurai bien aimé que ça se passe bien, qu’il puisse y avoir des trucs géniaux tournés sur ce film maintenant, qu’il se sente bien … mais bon.
           Je suis arrivée à la tente, je vais sortir ce qu’il faut pour le petit déj. … Il y a un drôle d’oiseau encore, avec une crête et un bec jaune, les plumes ébouriffées. Et toujours un petit corbeau qui essayait d’entrer dans notre tente. J’espère qu’elle n’était pas restée ouverte … mais je ne crois pas.


          J’écoute du dimmu borgir …. Les Cuernos sont vraiment très beaux, dans un écrin de lumière tamisée.
Je suis déçue, on avait parlé d’aller demander si la BBC pourrait éventuellement nous prêter un trépied pour Alexandre, en leur expliquant ce qu’il s’était passé, en laissant une caution, un passeport, enfin quelque chose ;… J’irai bien, mais je ne parle pas assez l’anglais … et les autres ne vont pas y aller. Je ne pourrais clairement pas prêter mon trépied tout le temps, surtout si personne n’essaye de trouver une solution autre que dire que c’est la fatalité. Tant pis.









              Encore une alternance bizarre aujourd’hui. Nous sommes à Puerto Natales, tous ensemble finalement pour louer la voiture. J’oscille encore entre pensées obscures et joyeuses, j’ai écouté à peu près de toutes les musiques et genres que j’aie sur mon mp3 ; après m’être assise un moment sur l’espèce de ponton auquel on accède par une échelle horizontale. 


               Dans le bus on s’est tous effondrés, Alex a essayé de dormir sous mon coude alors que je m’appuyais contre la vitre, que Mathieu s’était installé avec les sacoches photo comme oreiller et Xavier sur deux sièges … J’ai somnolé abstraitement sans réellement dormir.  La lumière a commencé à devenir vraiment géniale à l’approche de la ville. On a du changer de bus, on a essayé de changer quand il ne fallait pas puis on a failli ne pas changer lorsqu’il le fallait…. ( !) On est arrivé ici, en essayant d’optimiser et de composer avec le temps imparti : je suis allée faire les courses tandis que les autres allaient à l’auberge, puis on a trouvé une agence de location et, tout s’enchainant bien, on a pu avoir ce que l’on souhaitait ! Incroyable, on a un 4x4 et moi je n’ai rien à payer ; … on le prend pour 3 jours. On est retourné à l’hôtel Gimini (notre auberge, où on a pu laisser les affaires emportées hier à la va-vite). Les autres sont en fait entrain d’attendre qu’un gamin ait fini de jouer avec le distributeur automatique. D’ailleurs le gamin est déguisé en lapin de Pâques. Il faut encore que je sorte de l’argent, j’en ai un peu marre, c’est la 50ème fois … enfin non, la 8ème … mais quand même. D’ailleurs je ne sais pas ce qu'il faut que je retire … 40 000$ peut être … ensuite, j’ose espérer que ce sera terminé, sinon ça va commencer à être trop. Allez dernière étape, et après on y va, foncer dans la pampa ! Et dormir au camping.

 

            18h. La voiture est louée. Bonne tête grise. On est dedans. Je ne sais pas exactement à quelle heure on est partis (mais après 17h, fatalement) (Mmh !).
            18h41, on (Manue) ‘’fonce’’ (selon la forme douteuse du 4x4) sur la route bétonnée. Déjà pleins de champs de vaches, de panneaux serpentins et un ciel de malade. On ne s’est pas encore arrêtés mais on aurait pu cinq fois déjà. Les nuages obscurs s’empilent dans des suites de lignes ténébreuses et de trouées d’or.


            De retour au camp. Il a l’air d’y avoir moins de vent. C’est toujours assez curieux de se promener dans ce camping avec la BBC à côté, côtoyer ces gens qui font des documentaires géniaux....
            On a donc loué ce 4x4 gris qui n’a pas tellement la pêche mais qui a une bonne tête.... Après avoir quitté Puerto Natales à 18h15 au lieu de 16h30 comme on l’aurait espéré (le temps de louer le véhicule, d’avoir les explications, des informations sur les endroits beaux, sur le fait qu’il faille payer l’entrée du parc (déjà payée), des conseils sur la montée à un mirador ou il faut aller l’après midi sinon car dans le cas contraire, on n’a pas le soleil dans la figure (logique...), que la langue française est particulièrement mélodieuse, que les français semblent chanter comme des oiseaux en parlant (c’était assez drôle de devoir traduire ça aux autres, le ‘loueur’ ne connaissant pas tous les mots en anglais)) on a repris la route sous un ciel particulièrement impressionnant. Nuages très sombres partout, éclairés de différentes manières, par en dessous, entre, des trous d’or dans les nuées... Tout à l’heure j’ai aperçu la montagne au visage, qu’on a pu admirer l’année dernière depuis le camp italiano... elle avait toujours l’air aussi sévère... et d‘autres visions fantastiques dans les montagnes comme des dragons, des visages, des animaux ... dans la roche, on peut imaginer tant de choses...
Le ciel était fou, vraiment ... je suis passée de nouveau d’une euphorie agréable à des périodes de frustration quand on a dépassé des endroits magiques sans s’arrêter ... falaises brunes éclairées en or devant un ciel noir et au fond d’un camp de touffes ocres ... lieux magnifiques... Xavier sortait la tête par la fenêtre, nous nous ne pouvions pas à l’arrière. On a voulu s’avancer vers les torres dans cette atmosphère... toujours plus près... évidemment, impossible de les atteindre à temps. On a décidé de voter pour s’arrêter ... finalement on n’a jamais réellement fait de vote, juste avancé, encore, toujours, jusqu’à ce que le ciel s’éteigne, et qu’il n’y ait plus grand-chose à photographier, en fait. On s’est arrêté une fois que le massif était en vue. Dans un champ en bord de route, empli de buissons et de guanacos... je me suis faufilée entre les deux fils du bas (évidemment, le champ était clos) ; les autres ont essayé (avec succès) de passer au dessus, mais ça n’avait pas l’air simple d’éviter de s’accrocher aux barbelés... On a quand même pris des photos de touffes.


          Alexandre n’a rien essayé. Bref. Je vais arrêter de désespérer pour ça.
On est resté là jusqu’à ce qu’il fasse quasiment nuit. Le deuxième passage de barrière s’est fait en vitesse alors qu’une voiture arrivait en face. Le gars du camping nous avait dit où l’on pouvait voir des pumas ... un mélange habituel de appréhension et de fascination à l’idée d’en revoir .... surtout que 3 avaient été aperçus au laguna Amarga. On a commencé à guetter, en allumant les phares et cherchant les yeux. On a passé l’entrée du parc sans que personne ne nous demande rien (étrange), ... et on s’est retrouvé derrière une voiture 4x4 de la BBC, dans laquelle se trouvait un phare-projecteur mobile qui éclairait les abords de la route ... sans doute pour repérer les yeux afin de faire un suivi à pieds ensuite. ... On s’est dit qu’on allait la rattraper et rester collés derrière, mais évidemment ça n’a pas marché. Ils nous ont laissé passer. On s’est arrêté au milieu de nulle part quelques kilomètres plus loin. Tout feux éteints, on est sorti pour écouter ... le néant. Silence absolu...poignant. Pas un souffle de vent, rien. Juste nous, dans le noir quasi-complet. L’impression que n’importe quoi peut surgir, une ombre plus sombre encore que le reste, un craquement, un cri. ... Tous les sens en alerte... c’est quelque chose que j’aime beaucoup, surtout quand je ne suis pas seule ...pour l’instant du moins. On est resté là un moment, attendant que l’autre 4x4 surgisse, fantasmant sur le matériel que l’équipe BBC devait avoir ; ... les spots qui éclairent à des centaines de mètres, les détecteurs avec les pumas indiqués, suivi gps ou l’on peut surveiller les mouvements, jumelles ou caméras infrarouges... (on a imaginé du coup qu’ils allaient voir 4 pauvres taches à côté d’un véhicule.... plantées là à ne rien faire, parfois en regardant autour avec une frontale qui éclaire à moins de 10m.) .. d’autres outils plus improbables... comme : des apos à puma, quelque chose pour écouter très loin, que du coup ils entendaient tout ce qu’on disait ; le traducteur étant intégré l’ensemble s’affichait directement sur un écran. En tout logique, on a fait un test, en parlant tout bas dans le noir: ‘hello guys how are you ? What are you doing?’ Ça n’a pas marché, personne ne nous a répondu. On a aussi fait des signes avec la lampe frontale... ça m’a plus gênée... on aurait pu déranger la faune sans faire exprès et les embêter, de même coup.... Puis des bruits étranges, des cris étouffés se sont fait entendre, de plus en plus proches. Jusqu’à ce qu’on se rende compte que tous ces sons provenaient du 4x4 qui était entrain de nous rattraper. Le véhicule a stoppé à 200m de nous, ses occupant ont sondé un moment un côté de la route avec la lumière vive... on s’est douté qu’il y avait quelque chose là-bas. Mais on n’a rien vu. Ils ont éteint leurs phares et sont resté là.
          La suite du trajet m’a semblé durer une éternité. J’aurai bien aimé qu’il en dure deux ou trois. Jusqu’au camping, on a tenté d’éclairer avec la frontale aux piles vides, espérant croiser un regard... les seules observations furent des panneaux, et ... un lapin. Cette sensation de tension, d’attente, d’adrénaline ... j’adore.
           On est arrivé, on a cuit de la purée, de la soupe (qu’on a dilué dans l’eau chaude au lieu de l’eau froide, donc ça a fait des grumeaux). J’ai de nouveau été un peu exaspérée par certains gouts de luxe... la soupe, la purée, ‘dégueulasse’ ... désolée, moi, je mange volontiers ça chez moi, au lieu de gâcher et d’avoir à acheter autre chose.... Enfin en tout cas, on a mangé. Les garçons n’ont finalement pas trouvé ça si mauvais, la purée où j’avais ajouté sel et parmesan, la soupe dans laquelle j’ai ajouté du bouillon ... après quelques améliorations, le tout a été englouti!
 

           Je suis KO, même si je parle depuis une demi-heure... Le ciel redevient très beau. Avec des trouées d’étoiles et la lueur de la lune. Demain nous irons sans doutes au Laguna Amarga pour le lever de soleil ... ou plus tard ... en tout cas demain, on va visiter... je vais dormir.



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