lundi 2 juillet 2012

6 avril ?


10h30. 11h, peut être. On est toujours au Lago de los Tres, on va partir. Le démon est entrain de s’éveiller. On entend sa respiration qui gronde. Les nuages ont pris les cornes du Fitz Roy et de Poincenot. Des rafales descendent le long des montagnes... elles ne sont pas encore sur nous mais on voit des gerbes de neige se soulever par intermittence. Ca recommence.
             Je n’ai quasiment pas dormi. J’ai ‘fait’ quelque chose qui était entre le rêve et l’éveil, ou je voyais comme une carte (photo, peinture...) avec le Cerro Chalten, et où on nous posait en différents endroits... c’est comme s’il y avait une volonté qui disait ce qu’on allait faire. Aucun hasard. On n’allait pas derrière le massif, on rejoignait juste différents points devant. J’ai eu très froid aux jambes. J’avais juste les collants, le pantalon avait gelé. Pas très agréable. Il a fait -10. Mathieu a lancé des timelaps, moi j’ai essayé de monter sur la moraine et de faire quelques images du dessus mais je me suis plantée (plongée, enfoncée, bu la tasse) dans la neige avec l’appareil... c’était profond. J’ai assez mal au doigt, ce n’est pas bien grave mais embêtant, on dirait un caillou noir gelé. Cette nuit il était tout chaud et battait au rythme de mon cœur. 






            Le lever de soleil était plutôt beau, l’astre est passé sous les nuages, la montagne a pris feu ... puis tout s’est éteint, ... puis devenu jaune ... puis ré-éteint, définitivement. Le lac a commencé à geler. Une espèce de voile bizarre est arrivé depuis l’arrière. Et maintenant, le bordel arrive... Il faut qu’on y aille !






             On a commencé la descente depuis ... peut-être une demi heure et c’est vraiment ... (‘’waeep eh bin voilà, je viens de tomber’’)... c’est vraiment catastrophique.... c’est une sorte de périple sur un sentier verglacé ...mais réellement verglacé hein, pas à moitié. J’en arrive à la conclusion indéfectible qu’il faut absolument que je change mes chaussures parce que les semelles lisses... ça ne va pas du tout ! Et ... faire ça sans tomber c’est à peu près l’équivalent, je pense ... enfin, c’est un peu comme si on voulait faire tenir un éléphant en équilibre sur un ballon de baudruche (sans l’éclater bien sur) ... Les marches sont totalement couvertes de glace ... on essaye de couper parfois pour passer par les pierriers ; au bout de deux glissades incontrôlables j’en suis arrivée à cette conclusion : il faut ne pas passer par le sentier mais ... ça ne marche pas non plus, parce que les pierres sont verglacées sous la neige. Donc je ... sais vraiment pas comment faire. Heureusement il y a un peu moins de neige qu’au début, mais un nuage terrible vient à notre encontre. Dès qu’on a quitté le lac, on a vu qu’on était entourés de nuages de neige, et des rideaux de précipitations diverses s’étendent et s’avance de toute part. J’arrive à une sorte de succession interminable de marches qui sont comblées par du verglas. Je félicite vraiment les touristes qui sont descendus en baskets hier, je tiens à dire qu’ils ont vraiment du mérite... c’est un exploit. Allons-y.



            Bin bon sang.... on est presque en bas. J’ai cassé mon polarisant alors qu’il était dans le sac ; et je n’arrive pas à le dévisser. Donc pour l’objectif je ne sais pas ... il me semble qu’il est entier, j’espère ! Ca commencerait à ressembler à une malédiction, la Patagonie, là, sinon. En tout cas, descendre ce truc là sans se planter c’est un peu comme demander à un lama de faire du vélo, ou à une fourmilière de se suspendre à une branche ... ou à un ornithorynque de faire des tractions en se tenant par le bec sous une nuée ardente. Enfin c’est ... totalement invraisemblable, quoi ! J’ai croisé des gens qui montaient, un en basket trouées d’où dépasse un gros orteil en chaussette grise. Eux sont encore là ou ça va. Mais il y avait aussi des gens qui descendaient ... un qui semblait être en lévitation légèrement au dessus de sentier,  et qui curieusement ne tombait pas. Et un autre qui plantait une énorme branche devant lui à chaque pas... et qui ne tombait pas non plus. Mais bon c’est ... incroyable.
            Mon doigt m’énerve, ça fait mal, et à chaque fois que je l’enlève du bâton, ça m’élance ... et en plus, je tombe. Alors bon, j’essaye d’éviter.







              Xavier a réussi à enlever le polarisant ... il a du le casser complètement. L'objectif est intact, ouf. (Merci.) ... Il pleut, on croque un bout de fromage et de crackers dans l'abri ou la tente humide est toujours accrochée. On a poussé la curiosité jusqu'à regarder l'intérieur : un sachet, quelques vêtements, un livre je crois ... et le couteau, toujours sur la table. Pas âme qui vive, à part nous, qui ressemblons maintenant à un croisement étrange entre un monstre inconnu et des shadoks pompeurs. Moi, c'est plutôt le foetus avorté, d'une forme relativement carré avec la cape trop courte ... . Se voir dans cet accoutrement est quelque chose de particulièrement inhabituel est hilarant!









        J'arrive à un attroupement de hobbits des marais encapuchonnés .... c'est une espèce très rare, qui demeure uniquement dans les lieux particulièrement humides.  Elle est particulièrement difficile à observer.



          J'ai troué mon doigt ... malgré le désaccord frappant d'une vieille dame présente, fortement persuadée que ça allait s'infecter ... et que comme j'étais français, je ne parlais pas espagnol, et que les autres ne parlaient aucune langue, parce que les français ne parlent que leur langue, alors que là, on est en Amérique du sud, et qu'on devrait parler espagnol; et que c'est honteux, on devrait au moins savoir ... etc etc etc . Au bout d'un certain temps, elle a fini par devenir énervante, la dame.





 
            Retour au carnet.
            Bordel de majeur droit foutu.
            J’ai cru entendre un âne. Mais je crois que c’était une porte grinçante. Je suis HS. Totalement. Une seule envie : DORMIR. Mais je vais prendre une douche d’abord, par principe. On est à l’auberge à El Calafate. De retour après un bon resto. J’ai trop mangé, risotto aux légumes ; crumble aux fruits rouges avec sa crème glacée. Manue et Xavier m’ont payé le dessert ! (grand sourire) (j’avais payé le coca avant). On a failli de pas avoir assez avec le service de mesa à 8$/pers. Surprise du chef. Gné. Mais bon, on est arrivé à 540$ en additionnant tout ce qui nous restait dans un empilement improbable de billets, et Mathieu a miraculeusement sorti un ultime billet de 5 rescapé !


Allez. J’ai le choix entre la douche sans lumière et celle qui ferme pas ! Naze Max est passé par là (il faut connaitre les colocs pour le connaître, lui). Hm !
            Bonne nuit.





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